Internalisation des externalités

Le poulet, trop cher ou pas assez?

Il y a de celà quelques années, une chroniqueuse commentait la décision d'une chaîne de rotisseries de servir du poulet dont l'alimentation comportera dorénavant jusqu'à 10% de farines animales alors qu'auparavant l'entreprise faisait la promotion de son poulet nourri nourri uniquement de matières végétales. L'entreprise expliquait le coût plus élevés des poulets nourris de matières végétales et son désir de ne pas faire supporter d'augmentation à sa clientèle. L'explication donnée par l'entreprise me fait réagir.

Premièrement, la différence de prix entre le poulet nourri de matières entièrement végétales et l'autre poulet n'était que de 0,20$ le kilo (selon l'entreprise). Pour un poulet de 1,9 kilo, on parle d’une augmentation de moins de 0,40$! Combien pour une cuisse? Une poitrine? Personnellement, je ne connais personne qui soit capable de se payer un repas à 5,95$ (un morceau de poulet, des frites, etc., prix de 2011) et qui ne serait pas capable de se payer le même repas à 6,05$ ou même à 6,15$!

Deuxièmement, et de manière plus générale, la question du coût des aliments se pose différemment, selon moi. Certains aliments (industriels, transformés, etc ou comme ici nourris de farines animales) peuvent être produits moins chers car ces industries font supporter une partie de leurs coûts par l’ensemble de la communauté au lieu de leurs seuls clients. La société, l'État, subventionne en quelque sorte, la production de ces aliments. Par exemple, une entreprise qui bourre ses poulets d’antibiotiques encourt des coûts moindres en terme de mortalité et de maladies et peut donc vendre ses poulets moins chers. Mais cette décision a des conséquences économiques qui ne sont pas supportées par l’entreprise et ses clients. Ces antibiotiques se retrouvent dans la nature et dans la nourriture et créent des résistances chez les bactéries. Ce qui fait nécessairement augmenter les coûts des soins de santé. Si ces coûts étaient internalisés par le producteur de poulet, sans doute réaliserait-on que le poulet aux antibiotiques coûte en fait plus cher que le poulet "naturel".

C’est par une fiction (et en dérogeant aux principes de l’économie libérale) que le poulet industriel coûte moins cher que le poulet naturel.